L’Angoumoisine Isabelle Dethan rend Cléopâtre plutôt sympa
Julie PASQUIER; [email protected]
Durant tout le festival, l’Angoumoisine Isabelle Dethan dédicace «Moi, Cléopâtre, dernière reine d’Egypte». Mêlant biographie et fiction, son album casse les clichés.
L’album
Elle nourrissait le projet depuis plus de dix ans. Deux années de travail complètes auront été nécessaires à l’Angoumoisine Isabelle Dethan pour venir au bout de son album « Moi, Cléopâtre, dernière reine d’Egypte ». 202 planches à l’aquarelle, publiées par Dargaud. Sortie officielle: ce vendredi 31 janvier, en plein Festival de la BD. L’autrice est en dédicace tous les après-midi au Monde des bulles, place du Champ-de-Mars, mais aussi dimanche, en fin de matinée, à la librairie Cosmopolite.
En refermant votre album, on a presque de la compassion pour Cléopâtre… C’était votre objectif?
Isabelle Dethan.
J’ai voulu raconter une Cléopâtre démythifiée, tordre le cou aux clichés, montrer ses talents cachés. Il y a deux choses pour laquelle elle est connue: son aventure avec les maîtres de Rome, Jules César puis Marc-Antoine, et sa mort. On dit d’elle que c’était une femme fatale, une sorte de mante religieuse. Cléopâtre n’est pas égyptienne mais grecque. Elle n’est pas super mignonne mais plutôt classique. Elle charme surtout grâce à sa voix envoûtante et parce qu’elle est érudite. Elle adore les sciences - elle a, à sa cour, les médecins les plus réputés-, elle parle neuf langues, est curieuse, passionnée et elle a de l’humour.
Pourquoi connaît-on si peu de choses sur ce personnage de l’histoire égyptienne?
On ne connaît pas sa date de naissance, vers -69 av JC. On connaît son père mais pas sa mère. Il est possible qu’elle soit la fille de son père et de sa sœur. On n’a jamais vu une lignée qui se marie autant dans la famille, c’est étonnant. Tout ce qu’on sait sur elle a été déformé par les Romains. Dans l’Antiquité, les femmes ne devaient pas assister aux banquets. Or, elle le faisait avec Marc-Antoine avec qui elle formait un couple divin. Elle était la déesse Isis, lui était Dionysos. Les Romains se sont servis de cela pour dire que c’était une courtisane, une prostituée.
Votre album s’appuie sur des faits historiques mais vous y intégrez la fiction.
Les éléments biographiques, politiques et géopolitiques, la façon de s’habiller… Tout cela s’appuie sur des faits historiques. J’ai eu recours à la fiction pour ce qui touche à l’intime.
Sait-on comment elle s’est suicidée ce 12août 30 av JC?
Les scientifiques sont très partagés. Le serpent, ça matcherait bien parce qu’on sait que ses médecins faisaient des recherches sur leur poison. Mais elle est morte en même temps que ses deux suivantes. Cela voudrait dire qu’il y avait trois serpents cachés dans un seul panier de fruits… On peut aussi penser qu’elle avait du poison sur elle, dans un bijou. On n’a pas trouvé son corps. Il y a beaucoup de chances pour qu’il repose au fond de la baie d’Alexandrie. C’est très pollué, cela rend les recherches hyper dures et nécessiterait un investissement phénoménal.
L’Egypte antique vous passionne. Vous avez déjà sorti de nombreuses BD sur le sujet. Cet album, c’est un volet de plus?
Je ne m’étais pas tellement occupée de cette partie-là, la partie grecque de l’Egypte. Je me suis dit qu’il devait y avoir autre chose derrière Cléopâtre, la femme fatale. Et effectivement, des choses sont apparues et me l’ont rendue sympa. Bon, elle a quand même tué ses frères et sœur…
«Moi, Cléopâtre, dernière reine d’Egypte» d’Isabelle Dethan, éditions Dargaud, 26,95€.