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Cinéma, vendredi 31 janvier 2025 827 words

Festival de Clermont 2025 : découvrez “Apocalypse”, malicieux documentaire sur le Hellfest

Pendant le 47? Festival international du court métrage, jusqu’au 8 février, “Télérama” partage ses coups de cœur. Aujourd’hui, un film de Benoit Méry à rebours de la vision stéréotypée des métalleux. En accès libre jusqu’à dimanche soir.

Sur une départementale de Loire-Atlantique, une procession se forme. Blousons de cuir, vestes brodées des noms de leurs idoles (Gojira, Metallica…) et sacs de voyage sur le dos, les fidèles s’avancent vers le lieu saint par excellence pour tout métalleux à la fin du printemps : le , exploration internationale du genre musical, orchestrée par Olivier Richard. Dans Apocalypse, fascinant court métrage documentaire produit par le Grec (Groupe de recherches et d’essais cinématographiques), il plonge au cœur des moshpits emblématiques du festival de Clisson… et déjoue malicieusement nos attentes.

Certes, cette grand-messe est peuplée d’immenses barbus tatoués, et s’y enchaînent des riffs de guitare survoltés… Mais c’est avec astuce que Benoit Méry décentre le regard et s’amuse de l’imagerie associée au monde du metal. Ici, il filme le tee-shirt de La Reine des neiges arboré par un spectateur en pleine transe, là, il s’attarde sur le soin accordé par les artistes à leur maquillage avant de monter sur scène. Par tous les sens, le réalisateur bouscule attendus et préjugés. Alors que les festivaliers s’époumonent, Benoit Méry baisse le son et se place au plus près des techniciens et des agents de sécurité équipés de bouchons d’oreilles qui extraient les spectateurs de la foule. Un montage de l’image et du son espiègle et diablement efficace.

Et les femmes dans tout ça ? Depuis quelques années, plusieurs participantes et membres de l’organisation du Hellfest dénoncent des cas de violences sexistes et sexuelles en marge de l’évènement. Dans Apocalypse, elles sont brinquebalées entre les métalleux – comme cette spectatrice passablement agacée – mais prennent aussi part à la fête. À la tombée de la nuit, pour toutes et tous, la communion semble totale.

Entretien avec le réalisateur, Benoit Méry

Qui êtes-vous ?

Je m’appelle Benoit Méry. Je suis né en 1981, aux Lilas (Seine-Saint-Denis). J’ai grandi à Lyon et maintenant, je vis à Paris.

Votre parcours avant ce film ?

J’ai découvert le cinéma du réel à la fac, auprès de Invisible, un journal de confinement qui mêle magie, complot et relation amoureuse. Ce texte a été mis en ondes par France Culture.

J’ai travaillé plusieurs années au Hellfest. À force, j’ai commencé à regarder vraiment ce que j’avais sous les yeux.

Pourquoi ce court aujourd’hui ?

À l’époque, je filmais pour Sombrero & Co. L’été, c’était la période des festivals de musique. Un jour je me retrouve au Hellfest. Le metal, c’était pas ma passion. Mais j’aimais bien l’ambiance de ce festival et l’énergie dingue des fans. J’y ai travaillé plusieurs années. À force, j’ai commencé à regarder vraiment ce que j’avais sous les yeux. L’urgence des corps, le lâcher prise, la violence musicale. L’ivresse créée par cet immense chaos sonore. J’ai écrit le film en partant du son. Un film de cinéma du réel qui déborde un peu sur l’expérimental. Et puis j’ai eu la chance d’être sélectionné sur scénario par le Groupe de recherches et d’essais cinématographiques. Le Grec œuvre à l’émergence de nouveaux cinéastes en produisant des premiers films. Un truc de fou ! C’est comme ça qu’est né Apocalypse.

Citez trois cinéastes ou trois films qui vous ont donné envie de faire du cinéma, qui vous ont influencé ?

Dur ! Je vais tricher un peu. Je vais séparer cinéma de fiction et cinéma du réel. En fiction, je choisis les films de samouraïs d’ Stalker, d’Andreï Tarkovski, et Sombre, de Philippe Grandrieux. Un film très important pour moi. Pour le cinéma documentaire, Délits flagrants, de Raymond Depardon, a été mon premier choc. Et puis il y a eu

Quelle est votre profession, court-métragiste ?

Aujourd’hui, je suis à la fois auteur, réalisateur et monteur.

Après le court, forcément le long ?

Oui et non. Je travaille sur un prochain court, Taureau, ma première fiction. Que je vais pitcher à Clermont. En documentaire, je nourris depuis plusieurs années une collaboration avec l’artiste visuel Grégoire Korganow. Nous venons de terminer un court métrage qui s’appelle Double Dragon. Et nous entamons une résidence artistique dans le 93 autour de notre prochain long métrage documentaire.

Votre histoire avec Clermont ?

C’est la première fois que je vais au festival. Va falloir attendre pour les anecdotes croustillantes.

Le meilleur court métrage de ces dix dernières années ?

Luces del desierto , de Felix Blume. Les lumières et les voix du désert mexicain. Un bijou sonore.

Le meilleur court métrage de tous les temps ?

Topic I et II , de Pascal Baes. Un choc esthétique total. Une claque majeure.

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