Kazy Lambist, le Méditerranéen
« J'ai une petite obsession pour la mer Méditerranée. » Arthur Dubreucq est né à Montpellier il y a trente-deux ans, et s'il a trouvé son pseudonyme au Canada, dix-sept ans plus tard au cours d'une année d'échange scolaire en Colombie-Britannique (Kazy Lambist serait le nom d'un tord-boyaux local), son inspiration reste et demeure profondément méditerranéenne. En témoigne son nouvel album Moda (Cinq7 / Wagram) qui nous vaut de le voir ce jeudi au Rockstore, dans sa ville natale. Superbement mais sans le moindre pincement de bouzouki, frottement de cajón ou claquement de derbouka. Chez Kazy Lambist, Mare nostrum n'est pas une affaire de sons mais de frissons. Aux confins de l'electro atmosphérique à la Air et de la pop synthétique à la Sébastien Tellier, sa musique nous évoque un début de soirée estivale, les pieds dans le sable, quand le soleil n'est plus aveuglant mais lumineux, la chaleur plus écrasante mais enveloppante, et qu'alors l'ambiance se déboutonne avec légèreté... « J'avoue que c'est un moment de la journée qui me va bien, avec toutes les couleurs qui vont avec le passage du jour à la nuit , confie Arthur Dubreucq. Je suis d'une nature assez nocturne mais j'aime le moment du coucher de soleil, j'en ai de bons souvenirs de crépuscules en concert... Et puis, le coucher du soleil marque quelque part un commencement, j'aime ça ! » Mais le crépuscule, à force, ne va pas sans décolorer l'humeur de celui qui s'y épanouit : le chant comme la mélodie exhalent à la longue une élégante manière de mélancolie. « C'est vrai que j'ai tendance à être un peu nostalgique, reconnaît le chanteur. Je le sais alors j'essaie de compenser ma nature en proposant des morceaux qui puissent être un peu entraînants, voire dansants. Pour ne pas plomber l'ambiance. Ce n'est pas l'idée ! » Mais restons calmes et buvons frais : pour gorgée de groove que soit l'electro-pop de Kazy Lambist, celui-ci n'est jamais du genre à tabasser, son truc, c'est plus chalouper, onduler, balancer, voyez, en douceur et profondeur. Arthur Dubreucq sourit : « C'est vrai qu'il y a en nous une certaine douceur. La Méditerranée est une mer très douce, les vagues n'y sont pas énormes. On jouit aussi d'un climat idéal... Inconsciemment, cela se reflète dans la musique. » Et d'ajouter : « J'assume complètement de faire une musique du Sud ! » Détail amusant, qu'il faut sans doute être de la région pour pleinement apprécier, le premier morceau de son album a pour titre Cinémed , surnom du Festival international du cinéma méditerranéen de Montpellier. « Ah, le Cinémed... J'y allais tous les ans quand j'étais plus jeune. C'est grâce à ce festival que j'ai pu, avant de voyager, découvrir avant d'autres cultures. Je me régalais d'y voir des films grecs, turcs, palestiniens, etc. Toute une culture méditerranéenne, en fait. Et c'est d'ailleurs ce que je trouvais intéressant : découvrir tout ce que nous avions en commun. » Après un premier album auréolé de succès ( 33 000 Ft., en 2018) et la tournée qui a accompagné sa sortie, Arthur Dubreucq a pris son temps pour publier son deuxième long format... mais n'a pas chômé. Il a publié plusieurs maxis, dont un avec Jean-Benoît Dunckel du groupe Air, multiplié les DJ sets en France et en Europe, fait des concerts en Turquie, vécu durant deux ans à Rome, tourné en Amérique du Nord avec Kid Francescoli, son confrère en électro-pop sudiste (Marseille)... Une multitude d'expériences dont son enregistrement renferme l'écho : les chanteuses turques Sedef Sebüktekin et Den Ze, le groupe jazz Emilie Londonien, le saxophoniste Jowee Omicil, la chanteuse montpelliéraine Nelly Lawson, la Californienne Julietta... Moda regorge de collaborations ( featurings ). « C'est ce qui me plaît le plus, ce qui me donne de l'énergie : travailler avec des artistes que j'aime, échanger, créer ensemble. Après, je mets ma patte au niveau de la production. Au fond, je me considère plus comme producteur que comme chanteur. » Pour l'avoir vu fin août en concert au festival Palmarosa, à Montpellier, on s'autorise à s'inscrire en faux sur ce point : avec seulement deux musiciennes, il est parvenu à tenir la grande scène avec une classe décontractée (qui a dit typiquement méditerranéenne ?) et à emporter l'adhésion d'une foule qui ne le connaissait pas forcément. « Ç ! » En concert ce jeudi, à 19 h 30. Rockstore, 20 rue de Verdun, Montpellier. 23,80 euros. 04 67 06 80 00. Jérémy Bernède [email protected] Arthur Dubreucq a commencé à faire parler de lui sous l'alias Kazy Lambist il y a dix ans. ANTOINE HENAULT «
J'assume complètement de faire une musique du Sud Arthur Dubreucq (Kazy Lambist) »