Ouest-France
Mayenne; Orne; Avranches, Granville; Ancenis; Nantes; Nantes Nord-Loire; Nantes Sud-Loire Vignoble; Pornic, Pays de Retz; Saint-Nazaire, La Baule, Guérande; Châteaubriant; Angers, Segré; Cholet; Sarthe; Nord-Finistère; Rennes Sud-Est; Redon; Saint-Malo; Rennes Nord-Ouest; Rennes; Fougères, Vitré; Saint-Lô, Coutances, Cherbourg; Les Sables d'Olonne; Les Herbiers, Montaigu; La Roche-sur-Yon; Fontenay, Luçon; Challans, Saint-Gilles-Croix-de-Vie; Ploërmel; Auray; Vannes; Lorient; Pontivy; Quimper, Centre-Finistère; Quimperlé, Concarneau; Dinan; Saint-Brieuc, Lamballe; Guingamp; Loudéac, Rostrenen; Lannion, Paimpol; Bayeux, Caen; Pays d'Auge; Caen, Vire
Cultures, vendredi 31 janvier 2025 714 words, p. OF Mayenne édition_29

[Reportage...]

Zaïd ZOUIHRI.

BD. À Toulouse, des jeunes passionnés suivent un cursus spécifique afin de devenir auteur ou vivre du dessin. Ces étudiants forment, peut-être, la nouvelle génération de mangakas français.

Reportage

« Je ne pensais pas entrer un jour dans cette école. Là, je sais que je suis en train de tracer un chemin. Je vis un rêve », raconte Camille.

Il est 13 h. La jeune fille de 20 ans débarque dans l’ open space de l’Eima (École internationale du manga et de l’animation). Elle rejoint Baptiste et Gaspar, ses camarades de deuxième année, pour grignoter avant le cours de story-board, une histoire dessinée permettant, ici, la mise en scène d’un animé.

Maël et Clément sont restés peaufiner leurs dessins sur les tablettes numériques. Aujourd’hui, ils doivent dessiner, façon manga, le personnage d’Hadès, divinité grecque considérée comme le maître des enfers. Chacun son style. Les bruits des crayons qui tapent sur l’écran rythment l’instant.

Deux autres élèves, Jean-Félix et Théa se placent derrière la tablette d’un troisième, Hugues. Ils distillent quelques remarques sur le dessin de leur camarade. Les plus petits détails n’échappent pas à leur regard chirurgical. « J’aurais mis les ombres différemment », livre Jean-Félix avec sympathie à son camarade qui acquiesce.

Camille fait défiler sur son téléphone ses dernières créations. La petite audience s’enthousiasme devant le dessin d’un enfant habillé façon années 1970, réalisé au fusain. « Dans la classe, il y en a qui sont beaucoup plus forts !  »

« Notre vision du monde »

Apprendre le manga en France, en voilà un projet fou. C’est pourtant se propose l’Eima, école fondée en 2015, à Toulouse (Haute-Garonne).

Dans la bâtisse située à quelques pas de la Garonne, tout transpire la bande dessinée japonaise. En témoignent les couvertures colorées des centaines de mangas débordant des étagères. Ainsi que des œuvres d’élèves placardées sur les murs.

Ici et là, les planches prestigieuses de Tony Valente, auteur du manga Radiant , en imposent. « Il a animé une masterclass d’une semaine pour les élèves », raconte fièrement Claire Pélier, directrice de l’école.

Passionnée de manga, l’ex professeure d’art plastique a souhaité proposer un parcours qui permet à des élèves de passer du stade amateur à professionnel. De cette envie est née l’école, en 2015. Avec un tronc commun suivi de deux ans de spécialisation, soit en manga, soit en illustration.

La première promo comptait quatre-vingt-dix élèves. Aujourd’hui, ils sont 140. « Le marché du manga se développe d’année en année. Maintenant, tous les éditeurs cherchent le prochain Dreamland ou Radiant qui va bien marcher et s’exporter. »

Les deux mangas français publiés au Japon ont ouvert les portes aux auteurs français. « En tant qu’Européen, notre vision du monde crée de nouveaux axes qu’on ne retrouve pas dans le manga japonais », ajoute la responsable de l’école.

« Leur apprendre à vivre de leur travail »

Encore faut-il avoir le niveau, ainsi que les codes du manga, avant de prétendre bouleverser le genre. C’est là que l’Eima entre en scène. « Les élèves sont formés à l’illustration, au story-board et à d’autres activités gravitant autour du dessin. »

Des cours de gestion, du droit des artistes, de communicationsur les réseaux… sont aussi dispensés. « Dans notre école, on ne veut pas uniquement faire du dessin et raconter des histoires. On souhaite aussi leur apprendre à vivre de leur travail. »

La formation n’est pas gratuite. Une année à l’Eima, c’est entre 5 000 et 7 000 €, en fonction de l’année. Pour un diplôme pas reconnu par l’État. « C’est un budget, mais nous avons un taux d’insertion professionnel, l’année qui suit la fin d’études, entre 70 et 96 %. »

Clément est en deuxième année d’illustration : « J’ai d’abord suivi une formation de mécanique, une manière d’avoir un parachute si le dessin ne fonctionnait pas. Quand j’ai voulu intégrer l’Eima, j’avais un sentiment de saut dans le vide, surtout financièrement. Mes parents m’aidaient encore. J’avais beaucoup de stress. Finalement, je ne regrette pas. Artistiquement, je me suis construit grâce à cette école. »