L'Est éclair
EST
PAGES LOCALES, vendredi 31 janvier 2025 436 words, p. EST9

Théâtre

Le soi-disant « parler vrai » des politiques, mon œil !

Jean-François Denizot

Troyes. Parler pour surtout ne rien dire : mardi en soirée, au théâtre de Champagne, Clément Viktorovitch a décrypté quelques-uns des pièges de la rhétorique moderne.

Jean-François Denizot

Paroles, paroles, paroles… : mardi en soirée, Clément Viktorovitch, docteur en science politique et enseignant à Sciences-Po Paris, et parallèlement chroniqueur dans certains médias comme France Info et Quotidien, s’est intéressé à une question voire plusieurs à laquelle personne n’échappe, celles de la sincérité et de l’authenticité des politiciens lorsque, devant nous et la main sur le cœur, ils prennent la parole (on le sait depuis, il y a dans ce paragraphe une épanadiplose !).

Et là, dans l’esprit de ses deux ouvrages Le Pouvoir rhétorique et L’Art de ne pas dire (celui-ci rédigé en collaboration avec Ferdinand Barbet), un constat d’évidence s’impose : ils nous mentent, délibérément et en toute mauvaise foi, ou, à défaut, ils s’arrangent avec la réalité, qui n’est autre que leur réalité.

De la fiction, vraiment ?

Comment, à partir d’un sujet aussi sérieux, ne pas tomber dans le piège d’un exposé théorique un peu pesant, didactique avec les noms ésotériques avec leurs racines grecques des nombreuses figures de style de la rhétorique, et comment ne pas lasser le public, parmi lesquels nombre de jeunes visiblement lycéens et en quête d’arguments pour un débat en classe de philosophie ?

En communicant habile, Clément Viktorovitch – seul en scène, une belle performance – imagine s’apitoyer sur le sort d’un conseiller politique ayant « fait » d’un brave député de province notre président, rien de moins, avec les mots qu’il faut. Sauf que, lâché par son mentor pour une sombre affaire de « soins capillaires » (on ne parle pas de coiffeur, c’est trivial), de dépit il dit tout, en révélant combien le discours est conçu fallacieusement, en amont et en coulisse, pour surtout ne pas dire et cacher ce que l’on veut taire.

Le morceau de bravoure, dans ce spectacle, c’est le discours du candidat quand des médias malintentionnés ressortent, à l’heure de #metoo, un épisode sentimental qui heurte la morale. Alors, vite, attaquons, dénonçons l’arnaque, plaidons les bons sentiments, et surtout appelons à la rescousse la famille et les enfants : « Mes enfants, mes pauvres enfants, traînés dans la boue dans leur cour de récréation à l’école et salis à tout jamais ! » De la fiction, pas si sûr…