Déjà battu à l'Open d'Australie, Stefanos Tsitsipas n'a plus faim de tennis
LAURENT FAVRE
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REVERS A Melbourne, le Grec sort d'entrée d'un tournoi où il fut finaliste et trois fois demi-finaliste. Sur la pente descendante depuis un an, il ne cache pas une certaine lassitude, à seulement 26 ans
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Stefanos Tsitsipas est sans doute l'unique joueur qui mena deux sets à zéro en finale d'un tournoi du Grand Chelem, à Roland-Garros en 2021, sans que la quasi-unanimité de la tribune de presse - excepté la journaliste grecque qui le suit toute l'année - ne lui accorde la moindre chance de l'emporter. Certes, l'adversaire était Novak Djokovic, boa constrictor du tennis, le spécialiste de la mort lente et des retournements de situation. Mais l'incrédulité tenait aussi, sans doute, à lui, Tsitsipas, champion qui donnait déjà il y a 4 ans le sentiment qu'il lui manquera toujours quelque chose pour aller au bout.
En 2021, l'Athénien au physique de dieu grec incarnait encore l'avenir du tennis, une rente de situation qu'il devait à sa victoire à Melbourne deux ans plus tôt en huitième de finale sur Roger Federer, vainqueur des deux éditions précédentes. Depuis 2021, le beau Stefanos a joué (et perdu) une autre finale de Grand Chelem contre Djokovic, en 2023 à l'Open d'Australie (où il fut aussi demi-finaliste en 2021 et 2022). Il s'est maintenu quatre ans entre la quatrième et la sixième place du classement ATP, ce qui était en réalité déjà une régression alors que le Big 3 se disloquait - Nadal et Federer blessés puis retraités, Djokovic intermittent du spectacle. Depuis, Alexander Zverev, Casper Ruud, Daniil Medvedev et surtout Jannik Sinner et Carlos Alcaraz lui sont passés devant et lui barrent la route des demi-finales, quand il ne chute pas précocement contre un sans-grade.
« C'est plus qu'un accroc »
La défaite de Stefanos Tsitsipas au premier tour de l'Open d'Australie, lundi en quatre sets (7-5 6-3 2-6 6-4) contre l'espoir américain Alex Michelsen (20 ans, 42e ATP), est dans la lignée de ses résultats depuis son dernier titre, en avril 2024 à Monte-Carlo (avec des succès sur Zverev, Sinner et Ruud). Quart de finale à Roland-Garros, deuxième tour à Wimbledon, premier tour à l'US Open. Onzième mondial en fin de saison, il a raté les Masters pour la première fois depuis 2019.
C'est déjà fini pour Tsitsipas, mais la vraie question inverse la proposition: Tsitsipas est-il fini? A seulement 26 ans, ce serait insulter l'avenir que de l'affirmer mais le doute plane, tant le Grec a perdu de son magnétisme. Ses déclarations d'après-match en conférence de presse trahissaient les doutes d'un champion ordinaire. Un mauvais départ - « j'ai commencé très lentement » - et le doute qui s'installe. « Je ne frappais pas assez bien dans la balle, ça m'a un peu frustré. »
Sans jus, sans venin, Stefanos Tsitsipas avait pourtant renoncé à disputer le double pour « conserver de la fraîcheur ». Mais le mal est plus profond que des jambes lourdes. « C'est plus qu'un accroc et on a vu venir cette défaite, analysait l'ancienne championne belge Justine Hénin sur Eurosport. Le joueur affamé, habité, que l'on voyait encore il y a quelques années quand il n'était pas si loin de gagner un Grand Chelem, a disparu. Depuis un moment, on sent un manque de révolte, une forme de lassitude, d'acceptation et il y a une vraie difficulté à être accrocheur sur le court. On peut se demander s'il a envie de jouer. »
« Il y a moins de marge »
Sans aller aussi loin, Stefanos Tsitsipas admet qu'il était « plus frais » quand il est arrivé sur le circuit en 2018. « J'avais ce désir de réussir dans le tennis, d'avoir un bon début de carrière. C'est différent aujourd'hui. Je suis bien installé, je connais le circuit, je dispute les mêmes tournois encore et encore, année après année. L'énergie et la dynamique étaient différentes avant... » Il s'estime pourtant « un meilleur joueur ». « Avant, je jouais beaucoup à plat, ça ne marcherait plus. Désormais mes frappes sont plus lourdes et plus liftées. Mais le jeu a changé, il est devenu plus physique, il y a moins de marge, moins de points gratuits. »
Si son couple avec la joueuse espagnole Paula Badosa résiste à l'usure du temps, Stefanos s'est séparé cet été de son entraîneur de père, Apostolos. Et pour la première fois, il a renoncé à disputer le double avec son frère Petros, bien moins classé que lui. Les bonnes tragédies grecques se déroulent en famille.
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